J’ouvre un œil douloureux. Au-dessus de moi, le ciel gris de NOLA. J’ai… perdu conscience ? Je vais pour me redresser quand je me rends compte d’un changement… Et pas des moindre… En l’espace d’un battement de paupières, ma bouche s’assèche, ma gorge déglutie, mon cœur bat furieusement dans ma poitrine, un long frisson court le long de mon échine. Mon regard tombe sur ma jambe gauche. A travers la chaussure, j’agite les orteils. Ma gorge se sert et je sens l’incompréhension et la colère monter en moi. Qui ? Qui est en train de me faire illusionner un retour de ma jambe ? Ça n’est pas possible. Les jambes ne repoussent juste pas. Alors que je me mets enfin à bouger, mes gestes sont rapides et imprécis. Je me jette sur ma jambe comme un affamé sur un repas. Avides de savoir, mes mains remontent la jambe de mon pantalon. « Aaah… » Un long frisson remonte le long de ma jambe alors que je sens mes doigts caresser les poils qui la recouvre. Je sens l’humidité monter dans mes yeux alors que mes mains parcourent la jambe parfaitement construite. Toujours assis sur le sol, je me laisse aller en arrière, me rallongeant sur le sol rude de NOLA. Un rire mêlant nervosité, joie et incompréhension s’échappe de mes lèvres. Je ne comprends pas comment c’est possible mais, bordel… Qu’est-ce qu’on s’en fout ! Ma jambe ! J’ai de nouveau une jambe, putain ! Au bout de je ne sais combien de temps, mon rire finit par s’étouffer et je me relève rapidement. Le souffle légèrement court d’avoir ri, je sautille sur place, savourant la sensation des muscles et des tendons s’activant. Un large sourire me monte aux lèvres alors que je sens la fabrique du tissu caresser la peau de ma jambe. C’est con, mais ce genre de contacts dont personne ne se rend compte, ça m’avait manqué. La sensation de la plante du pied épousant celle du sol. La sensation moite d’une chaussure trop chaude, celle désagréable d’une chaussette un peu trop serrée autour de la cheville.

Cependant, mon sourire s’écroula sur lui-même telle la neige fondant en plein désert. Mon corps. En face de moi. Par terre. Je me sens pâlir. Mes mains passent sur mon torse, comme pour s’assurer que j’étais bien toujours tangible et palpable. Je suis… ? Non, ce n’est pas possible. Les fantômes apparaissent tels qu’ils étaient à l’instant de leur mort. Je n’aurais pas récupérer ma jambe. Je me précipite près de mon corps, toujours inerte. Rapidement, je check mes signes vitaux. Bon, visiblement, je suis bel et bien matériel. La théorie de la mort est donc à exclure. Mes doigts filent dans ma nuque pour chercher un pouls ou quelque chose s’y apparentant. Rapidement, je fais le calcul. Rythme cardiaque normal. Je vis. J’ai l’air d’aller bien même. Si ce n’est l’inconscience. Je me penche et je tapote gentiment les joues de mon corps… Par les cornes de Cernunnos, que cette situation est étrange… « Hey. Réveille-toi. » Je me fiche un instant alors que j’entends réellement pour la première fois ma nouvelle voix. Ok. Soit j’ai abusé sur l’alcool hier et ça me nique les cordes vocales aujourd’hui, soit je ne suis pas non plus dans mon corps. Je me vois ouvrir les yeux, ce qui reporte mon attention sur le corps allongé. « Hey, ducon. Tu sais m’expliquer ce qui se passe ? » Comme quoi, même sans mon corps, je reste fidèle à moi-même en ce qui concerne la prose et la politesse. Voilà qui est rassurant.